Origine du nom de la ville
D’entrée disons-le, l’origine du nom reste une énigme bien que nombre d’interprétations aient été proposées.
Morlaeum
Le Morlaisien Albert Le Grand, le père de l’hagiographie bretonne, dans son livre paru en 1636, « Vie, gestes, mort et miracles des Saints de la Bretagne Armorique », indique qu’a l’époque romaine le port s’appelait Hanterallen et l’oppidium (place forte), Juli. Au XIIe siècle, selon le moine dominicain, Morlaix se serait appelé Morlaeum. Albert Le Grand s’appuyait sur le témoignage de Conrad, archidiacre de Salsbury, dans son ouvrage datant de 1167 « description des deux Bretagnes ». Conrad a bien existé, il fut l’aumonier de Henri II Plantagenet, mais le hic c’est que Fanch Gourvil, malgré ses recherches Outre-Manche n’a pas retrouvé trace du livre de Conrad.La « Description » serait donc selon Fanch Gourvil une supercherie historique forgée par un auteur inconnu du XVIe siècle. L’historien La Borderie (1) juge aussi ces propos apocryphes. D’ailleurs le nom Morlaeum ne semble-t-il pas fabriqué à partir de la forme française Morlaix et donc inconcevable avant la fin du XVe siècle ? Conrad attribuait bien aussi l’évangélisation de notre cité en l’an 72 par Drennalus, disciple de Joseph d’Arimathie, or le christianisme n’a pas pu faire d’adeptes dans cette partie osismienne de l’Armorique avant le Ve siècle au plus tôt.
D’autres étymologies ont été proposées et sont des interprétations du nom latin de Morlaix. Le premier document conservé où figure le nom de Morlaix est l’Acte de Fondation de Saint Martin rédigé en Latin. Le 12 mars 1128, le vicomte Hervé de Léon fit don aux moines de Marmoutier d’une terre (2) « juxta Castrum meum, quod vocatur Mons-Relaxus » (« auprès de mon château fort qui est appelé Morlaix »).
Dans cette version manuscrite du Catholicon(1464), Jean Lagadec écrivait MONTRELAES, en français MONTRELAIX ou MOURLAIX ; en latin, HIC MONS RELAXUS
Les historiens qui pensent que le nom de Morlaix est issu du mot latin traduisent Mons par Mont. C’est en effet sur un promontoire que s’est dressé un château fort qui a peut-être remplacé un castrum. C’est au pied de cette forteresse, à l’intérieur des remparts que s’est édifiée la ville proprement dite, sans ses faubourgs.
Comment traduire relaxus ? Ce mot est-il un adjectif ou un substantif ? là aussi, les avis divergent.
Faut il traduire par Mont ample, vaste, large ou étendu ? Mont découpé ?
La colline du Château s’étend effectivement en direction de Plourin.
Faut-il traduire par Mont du Repos ?
La Ville était-elle une étape sur la voie romaine Reginea (Erquy) à Gesocribate (Brest) ? C’est le sens que lui donne Louis Le Guennec mais il considère que Mont Relaxus serait issu de « Montrelais ».
Quelques partisans de l’évolution à partir du mot latin soutiennent que Mont Relaxus est devenu Montreles en Breton puis Montrelais et Morlaix.
Origine Celte
Pour Fréminville, Morlaix vient de Mor-lès ce qui signifie « près de la mer ». J Darsel indique (3) que vers 1830, à l’entrée de la rue du Mur, le jambage en pierre d’une porte portait en relief et caractères romains le mor « Morles ». Cette pierre qui provenait probablement d’un édifice de la Ville attestait selon certains que la ville s’est appelée ainsi. Est-ce cette pierre qui a été scellée au dessus de la devanture du magasin Dorval, 1, rue de Brest ?
Pour Auguste Brizeux, le nom dérive de Mor-Laes, grand perthuis.
Pour De La Villemarqué, Morlaix est un nom de lieu-dit et de « villa » en Cornouaille britannique et signifie grand-perthuis (détroit entre une île et le continent).
D’Ogée propose « Mons Relaxus », mont élevé, ou « Mor-Treleg », mer resserrée, car Morlaix est assis sur un bras de mer.
Pour Monsieur de Goesbriant, « Mons Relaxus » vient du celte « Montroules » et il y voit la cour où se réunissaient les montres de nos ducs (revues).
Un calembour
Le Baron de Wismes (4) pense que le mot à pour origine un calembour « s’ils te mordent, mords-les » (ils = les anglais). La ville en a fait sa devise.
Le Terrouer de Morlaix
La dernière explication émane de l’érudit abbé Feutren (5) qui, après Le Guennec, s’est penché sur les archives du château de Lesquiffiou. Sur un aveu du 17 janvier 1477 il est question d’une terre appelée « le parc du Relaix assis près le chasteau dudit lieu » (de Morlaix).
Le « terrouer de Relaix » est aussi attesté sur un acte du 31 mai 1451. Le cadastre de Morlaix (1834) n’indique pas ce « parc du relaix » -parc signifie champ-. Pour l’abbé Feutren, le château aurait pris le nom du terroir, Mont Relaix, et serait devenu par la suite Mourlaix, et enfin Morlaix en 1500. La forme bretonne Montroulez serait apparue ultérieurement. Cette nouvelle hypothèse en vaut bien une autre et même si aujourd’hui elle a notre faveur, nous nous garderons bien de trancher.
(1)Arthur de la Borderie – « Histoire de Bretagne », tomes 1 et 2 (Rennes 1905-1906) - (2)Dom Morice, « Histoire de Bretagne », preuves, tome II, Paris 1746 - (3)Histoire de Morlaix, édition de 1942, page 14 - (4)Bulletin archéologique de l’association - retonne. 1851, page 159 - (5)Bulletins paroissiaux de Pleyber-Christ de 1981 et 1982.
(« Bretagne d’hier : Morlaix » Tome 1. Marthe Le Clech)